La situation que nous vivons en ce moment est inédite. Elle peut représenter une belle opportunité pour réfléchir aux transformations des relations entre les professionnels de l'éducation et les familles afin de garantir la continuité pédagogique.
Information quotidienne
Dans la période, les directeurs d’école sont en première ligne. Ils doivent répondre à des directives parfois très contraignantes : lister les adresses mail des parents, relever les absences au quotidien en complétant des tableaux, des formulaires… Des obligations qui s’ajoutent à celles déjà pléthoriques que le Sgen-CFDT dénonce régulièrement.
La communication quotidienne avec les services académiques, les échanges mail quotidiens, l’information via les sites gouvernementaux sont chronophages et pourtant indispensables à la bonne marche du service public d’éducation. Pour le Sgen-CFDT, cela relève de l’urgence et doit être priorisé : les tâches régulières non urgentes doivent donc être écartées (enquêtes, statistiques…), la confiance envers les personnels est plus que jamais d’actualité.
Face à une situation inédite, les directrices et directeurs d’école prouvent une nouvelle fois leur grand professionnalisme. Pour le Sgen-CFDT, cet engagement devra être reconnu à l’issue de la crise. Par du temps : en leur permettant par exemple d’être remplacés en fin d’année scolaire par les brigades (moins sollicitées en cette période) ou par une indemnisation.
Comment communiquer avec les élèves et leurs familles ?
Garantir la continuité pédagogique dès la maternelle via les outils numériques est pour le Sgen-CFDT, plutôt présomptueux. C’est avant tout par un contact régulier avec la famille que l’enseignant pourra espérer assurer cette continuité. Informer les familles nécessite des échanges directs et clairs.
En maternelle, les enseignants rencontrent quotidiennement les familles, un contact direct naturel qui contribue à instaurer un climat de confiance bénéfique. Lorsque l’enfant grandit, les familles et les enseignants se rencontrent moins souvent, il est donc nécessaire de penser d’autres modes de communication (téléphone, courriel).
La situation épidémique remet en lumière l’importance de ces liens. Créer ou renforcer des relations régulières avec les familles développe la confiance et favorise une complémentarité éducative qu’il convient de reconnaitre et pérenniser. Dans ce cadre, le Sgen-CFDT est intervenu auprès de la DGRH, direction des ressources humaines, pour que les difficultés d’accès aux outils numériques des familles les plus démunies, soit prise en considération. En effet, comme le signale ATDQM, peu d’élèves de familles défavorisées ont accès à ces outils et sont de ce fait, éloignés des plateformes mise à disposition.
Dans les clusters la relation à distance est indispensable. L’accès aux plateformes d’enseignement à distance, ENT… nécessite l’accompagnement des enseignant.e.s. invité.es à contacter les familles pour garantir un suivi pédagogique qui passe le plus souvent par les outils numériques.
Continuité pédagogique ?
Le coronavirus oblige les enseignant.e.s et les élèves à mettre en place de nouvelles formes de travail, d’entraide, d’accompagnement à distance. Cette situation amène les équipes à repenser l’accompagnement des élèves, hors la classe, dans un contexte bien particulier où la présence physique est exclue. Elle encourage à penser l’accompagnement des élèves et de leurs familles hors des contraintes quotidiennes de la scolarisation.
Une nouvelle forme d’apprentissage ?
Pour Bruno Devauchelle, enseignant-chercheur à l’université de Poitiers : « Cette nouvelle situation amène les enseignants et les élèves à mettre en place de nouvelles formes de travail, d’entraide, d’accompagnement basées sur la distance. Comment amener l’enseignant à penser la situation qu’il connait, la salle de classe en direct et en face à face, dans un contexte dans lequel cette co-présence est occasionnelle, voire absente ?
Dans le même temps comment amener les élèves, et leurs familles, à imaginer ce que c’est qu’apprendre en dehors de la force coercitive représentée par l’ensemble des contraintes quotidiennes de la scolarisation : horaires, lieux, découpages disciplinaires, consignes à court terme, travail suivi et guidé en présence, etc…. Il y a de la transformation profonde qui peut être imaginée dans les années à venir. »
Pour le Sgen-CFDT, la continuité pédagogique ne peut se dispenser du lien régulier entre l’enseignant.e et l’élève. C’est cet accompagnement qui garantira le suivi et l’implication de l’élève et de sa famille et qui permettra d’éviter une césure importante dans les apprentissages.
Il ne s’agit pas de redonner sens à l’école mais de redonner sens à l’apprendre. Or la situation que nous vivons en ce moment est une belle opportunité, en s’appuyant sur les moyens numériques de réfléchir à ces transformations qui permettront de fonder l’enseigner et l’apprendre de demain. – B. Devauchelle
La «révolution numérique» qui n’a toujours pas eu lieu à l’École, permettrait peut-être de changer le regard porté sur les apprentissages en classe et leur articulation avec des apprentissages hors la classe. C’est une demande ancienne, espérons que la transition numérique puisse enfin s’engager.
Pour le Sgen-CFDT, cela réclamera un investissement d’ampleur de la part des personnels qu’il convient de reconnaitre.