CDEN 87 « carte scolaire » du 15 février 2019

Le CDEN de repli entérinant la carte scolaire de Haute-Vienne pour la rentrée 2019 s'est tenu ce vendredi 15 février. Nous avons voté CONTRE ces mesures et vous expliquons pourquoi.

Le CDEN commence à 10h, à la DSDEN site Leroux.

 

Sont présents : M. Jérôme Decours, SG de la Préfecture de la Haute-Vienne ; Mme Orlay, Inspectrice d’Académie DASEN de la Haute-Vienne ; Mme Grizon, Secrétaire Générale de l’IA ; Mme Morizio, Mme Yildirim, M. Escure, vice-présidents du Conseil Départemental de la Haute-Vienne et d’autres élus du CD 87 ; des maires ; des représentants de parents d’élèves (FCPE, AAPE) ; M. Anaclet (FOL) ; Mme Friconnet (UDAF 87) ; des DDEN ; des maires ; M. Czekala et Mme Meuleman pour la DiMOS et des représentants des organisations syndicales FSU, UNSA, FO et Didier Marec pour le Sgen-CFDT.

 

La DASEN précise pour commencer que, suite aux reports des différentes instances la semaine dernière et de la tenue du CDEN du 7 février, le seul point à l’ordre du jour aujourd’hui est la carte scolaire dans le premier degré.

 

Déclarations liminaires de la FSU, de l’UNSA et du Sgen-CFDT Limousin

 

Mme Morizio, 1ère vice-présidente du Conseil Départemental, rebondit sur notre déclaration liminaire et rappelle que 2 motions ont été votées en urgence par le CD : l’une contre la hausse des effectifs en milieu rural impacté par des fermetures qui sont la conséquence des dédoublements imposés en REP et l’autre contre la suppression des dotations horaires en SEGPA.

Elle regrette des décisions qui ont été prises par le gouvernement, notamment sur le dispositif des PDMQDC qui était pourtant prometteur et pertinent.

Des dispositifs sont supprimés à notre grand regret, ils avaient pourtant mis l’Education Nationale sur de meilleurs rails, ce sont des décisions qui mettent les élèves dans des difficultés croissantes.

Elle annonce d’ores et déjà que le Département ne peut donc soutenir ce projet de carte en l’état et votera contre.

M. Decours s’excuse à 10h30 car il doit déjà quitter le CDEN mais il assure l’assistance que les propos tenus, notamment lors de la lecture des déclarations liminaires, seront transmis au Préfet.

La DASEN répond sur la question du plan de rattrapage demandé par les OS. Elle dit que « c’est une entrée très compliquée politiquement ». Techniquement parlant, elle rappelle que l’académie de Limoges a un taux d’encadrement P/E supérieure à la moyenne nationale, aux alentours de 5.80, et donc que ce plan de rattrapage s’il était mis en place ici devrait l’être aussi pour d’autres académies.

Les OS lui font remarquer unanimement que cette moyenne « académique » ne correspond à rien et surtout pas à la réalité de la Haute-Vienne, puisque notre P/E de 5.35 nous place seulement au 78ème rang national ! La moyenne remonte uniquement grâce au P/E élevé de la Corrèze et surtout celui de la Creuse, supérieur à 6 du fait de son hyper ruralité (3ème rang national).

« Le P/E est un indicateur parmi d’autres », ajoute-t-elle.

Il est pourtant fiable, objectif car purement mathématique et donne la réalité des écarts entre les départements. Même s’il a certes augmenté mécaniquement avec la baisse démographique de ces dernières années, et par le gain de 86 postes depuis 2012 (même si l’on en avait auparavant perdu 40 en 2011 sous le quinquennat Sarkozy, lorsqu’un certain Jean-Michel Blanquer était à la tête de la DGESCO), l’écart à la moyenne n’a quant à lui pas beaucoup évolué puisque la moyenne nationale a elle-même augmenté parallèlement…

Mme Orlay prône « une politique sur un temps long », elle dit avoir le souci d’avancer, ce qui nécessite un fort engagement.

Le territoire est au service de l’élève et non l’inverse, c’est un équilibre difficile à trouver mais c’est le choix que l’on a fait, avec les moyens que l’on a. Le regard est d’abord sur l’élève, les dispositifs sont au service des élèves.

 

Mme Morizio prend à nouveau la parole pour rappeler que la collectivité qu’elle représente a des responsabilités importantes car elle utilise les deniers publics, et que lorsque des territoires ruraux sont mis en difficulté, il est normal que le CD réagisse en regard des lourds investissements faits.

Selon elle, « les décisions prises vident de leur substance certains territoires ».

Elle rappelle les efforts financiers importants faits par le Département sur les bâtiments et les ateliers des SEGPA, et ce dans le but de mettre les élèves dans des situations de réussite. Elle pointe le paradoxe du discours gouvernemental, qui dit d’un côté que pour réussir, il faut que les élèves soient peu nombreux, à travers son dispositif des CP-CE1 dédoublés en REP, mais que cela ne semble pas gêner que d’autres se retrouvent à 30 par classe.

Est-ce bien raisonnable ? Il y a des choix que l’on dénonce en tant que politique mais aussi en tant que citoyen. Ce qui peut servir le mieux les élèves est notre priorité. (Annick Morizio)

 

M. Escure souligne et se félicite du dialogue quasi quotidien entretenu avec la DSDEN et « comprend les contraintes que chacun peut avoir », mais rappelle qu’en tant qu’élu, « les compétences ou les missions ce sont les moyens, on doit avoir une vision, chevaucher les compétences et voir à long terme comment le territoire peut s’équilibrer, le glissement qui peut s’opérer, la fracture territoriale. Selon lui, une analyse faite en sortant un peu Limoges et son poids de la problématique est nécessaire.

Mme Tuyeras, maire de St Brice/Vienne et élue du CD 87, ajoute que la compétence et la mission des élus est d’être à l’écoute des administrés, que les communes ont gardé la clause de compétence générale et que leur problématique est l’aménagement du territoire. Elle pointe l’envie de certains maires de baisser les bras.

A certains moments, on pourrait penser que le dialogue est ouvert et qu’il y a une écoute suffisante et bienveillante, mais la préoccupation envers le milieu rural n’est pas assez forte et prégnante. Le rural paie cher un désintéressement, un désamour des politiques. Il va y avoir un fort sentiment de déclassement avec ces 12 fermetures sur 14 dans le milieu rural. (Sylvie Tuyeras)

 

Mme Yildirim abonde en ce sens et dit son inquiétude.

Quel message va être véhiculé ? Dans le contexte social actuel, même si on peut comprendre les raisons statistiques des mesures, le message envoyé d’opposition entre le rural et l’urbain risque de rajouter au sentiment d’abandon de certains territoires.

 

Mme Morizio ajoute que les élèves des classes rurales présentent souvent les mêmes difficultés que les élèves des zones urbaines, et qu’il y a des tensions très fortes dans certains territoires qui se sentent délaissés.

Le Conseil Départemental se doit d’accompagner financièrement dans son rôle de péréquateur les territoires qui se sentent déclassés, c’est notre inquiétude majeure.

 

Pour clôturer ce long débat, la DASEN conclut que l’on dit tous la même chose, « mais avec des entrées différentes » et qu’il est nécessaire de faire ces constats ensemble. Selon elle, il est important de rappeler que les fermetures proposées ne concernent in fine que 14 classes sur 1260.

 

MESURES DE CARTE SCOLAIRE

Mme Orlay annonce que dans l’élaboration du projet de carte scolaire, les services ont travaillé sur 2 segments distincts :

–          1er segment : REP/REP+ et milieu rural socialement défavorisé

–          2nd segment : toutes les autres écoles du département

 

Organisation départementale :

Un diaporama est projeté, commenté par Mme Grizon et présentant les données statistiques prises en compte pour l’élaboration de la carte.

Mme Orlay rappelle qu’on regarde les données quantitatives mais qu’il faut aussi considérer les données qualitatives. Elle parle également d’une donnée importante à prendre en compte : 4 500 élèves de notre département sont scolarisés hors secteur.

Tissu scolaire :

–          42 communes avec au moins 1 école (71% des communes du département avec école contre 62% nationalement)

–          60% des communes avec écoles en ZRR

–          Sur les communes avec écoles, 42% en RPI et 58% en dehors

–          253 écoles : 82 à Limoges ou ds son unité urbaine ; 171 écoles hors unité urbaine de Limoges

Typologie des classes :

–          à 1 seul niveau : 52 % des élèves

–          à 2 niveaux : 42%

Soit 94 % des élèves dans un double niveau au maximum.

–          à 3 niveaux : 5%

–          à 4 niveaux : 1 %

–          à 5 niveaux : 3 classes dans tout le département

 

Projections démographiques :

–          Au niveau de l’Académie : R 2018 perte constatée de 1,6 % des élèves et – 1,44 % attendue pour R 2019 (53 918 élèves attendus), ce qui représente l’une des plus fortes baisses en France. Baisse prévue également pour 2020 et 2021.

–          En Haute-Vienne : R 2018 perte de 306 élèves et prévision de – 309 élèves attendus en 2019, dont 191 en élémentaire, et ce malgré une prévision de + 140 élèves de maternelle suite à la scolarisation obligatoire à 3 ans (+26 000 au niveau national). Prévision d’environ – 500 élèves en 2020 et 2021.

A ce sujet, une OS dénonce le « cadeau » de 50 M€ fait aux écoles privées sous contrat par le Ministre Blanquer, du fait que cette scolarisation obligatoire à 3 ans contraindra les municipalités à financer à la même hauteur que l’école publique les maternelles privées sous contrat.

Les DDEN s’associent à cette remarque et regrettent que ces deniers publics qui seraient si précieux ailleurs soient offerts aux écoles privées sous contrat. Mme Tuyeras ajoute et déplore « qu’un forcing incroyable est fait en ce moment par certaines écoles hors contrat auprès de certains maires. »

Mme Berger, maire de St Hilaire la treille, dit son inquiétude pour son secteur, même si aucune fermeture d’école n’est prévue cette année dans le département.

La DASEN interroge alors l’assemblée : « Comment fait-on arriver des gens ailleurs que dans la couronne périurbaine qui concentre à elle seule 42% des effectifs scolaires ? » Elle n’a pas la réponse, se dit ouverte au dialogue et « preneuse d’idées nouvelles ».

M. Escure dit qu’il est important de faire intégrer par tous qu’il faut accepter qu’en milieu rural, les services publics coûtent cher, forcément.

Attention à l’hyperconcentration, qui peut conduire à l’explosion. Nous devons porter une vision globale et transversale. Si les structures d’accueil existent sur le territoire, on peut espérer que les élèves restent dans ces communes, même si les parents travaillent à l’extérieur.  (Fabrice Escure)

 

M. Gauthier, IA adjoint, énonce alors les mesures de carte.

Il parle du retrait des 4 mesures décidées la veille en CTSD :

fermetures annulées à Peyrilhac, Razès et Solignac et ouverture annulée à Beaune-les-mines (mise en situation de vigilance d’ici juin). La compensation de ces fermetures annulées sera la perte d’1 TR (2 postes de brigade créés au lieu de 3) et d’1 moyen de réserve (4 postes mis en réserve pour la phase de juin au lieu des 5 prévus initialement).

Mme Berger demande pourquoi Solignac a été retiré de la liste des fermetures envisagées. M. Gauthier lui répond que cette décision est liée à une question d’organisation pédagogique dans une école particulière située sur 2 sites géographiquement éloignés.

Mme Friconnet parle au nom de l’UDAF de son inquiétude quant à l’impact de ces 14 fermetures sur les élèves les plus fragiles, en particulier ceux en situation de handicap.

M. Lardillier, maire de St Pardoux, dit ses craintes quant au fait de ne conserver que 4 moyens de réserve pour les phases d’ajustement de juin et septembre, ce qui lui paraît trop peu. « Il faudrait faire preuve de sagesse. »

M. Gauthier répond que les contraintes sont fortes mais qu’il pense garder suffisamment de moyens de réserve afin d’éviter au maximum une fermeture en juin ou septembre, en cas de besoin impératif d’ouverture.

 

RECAPITULATIF DES MESURES DE CARTE :

14 FERMETURES :

EM Bessines / Gartempe

EM Nexon

EM Jean Macé Limoges

EM Jacques Prévert Condat / Vienne

EP St Maurice les Brousses

EP Oradour / Glane

EP St Germain les Belles

EP Aureil

EP Nouic

EP St Auvent

EE Jean Montalat Limoges REP (hors CP-CE1, classe autres niveaux)

RPI St Brice / Vienne – St Martin de Jussac

RPI Châlus – Pageas

RPI Chamboret – Vaulry

 

8 OUVERTURES (Hors EP) :

EP Eymoutiers

EP Eyjeaux

EE Jean Gagnant St Priest Taurion

EP St Gence

EE Jaurès Panazol

EE Jacques Prévert Sagnat Bessines / Gartempe

EE Verneuil / Vienne

EP Guy Monnerot Boisseuil

 

11 OUVERTURES (en REP / REP+ Limoges) :

EE Gérard Philipe : 1 CP dédoublé

EE Jean Montalat : 1 CE1 dédoublé

EE Le Vigenal : 1 CE1 dédoublé + 1 poste autres niveaux

EE Les Homérides : 1 CE1 dédoublé

EE Marcel Proust : 1 CE1 dédoublé

EE René Blanchot : 1 CP dédoublé + 1 poste autres niveaux

EE Henri Aigueperse : 1 CE1 dédoublé

EE Jean Le Bail : 1 poste autres niveaux

EE Marcel Madoumier : 1 CE1 dédoublé

 

Réorganisation pédagogique Limoges :

EEA Condorcet : + 3 postes / EEA Roussillon : – 3 postes

 

Brigade de remplacement : + 2 postes de TR

Les 5 postes attribués l’an dernier à la suite de la signature d’une convention ruralité ont été rattachés, pour l’année scolaire 2018-2019 à la Brigade départementale. A la rentrée 2019, ces 5 ETP sont retirés de la brigade pour alimenter le réseau scolaire rural.

Accompagnement de l’inclusion scolaire :

IEM Grossereix : +0,5 ETP

DSDEN 87 : +0,5 ETP ERUN école inclusive

DSDEN 87 : +1 ETP d’enseignant référent

 

+ 4 ETP mis en réserve pour la phase d’ajustement de juin.

 

La carte scolaire est soumise au vote (uniquement consultatif) :

POUR : 0 – ABSTENTION : 9 (dont des maires et la FSU) –  CONTRE : 13 (dont le Conseil Départemental, la FCPE, l’UNSA, FO et le Sgen-CFDT)

 

Pour notre part, il nous a paru légitime de voter CONTRE cette carte scolaire dans la mesure où, malgré quelques améliorations minimes depuis le projet initial, le milieu rural et la maternelle payent un trop lourd tribut aux mesures dogmatiques imposées verticalement par le Ministère, en dehors parfois de toute logique.

Le taux d’encadrement de la Haute-Vienne est toujours trop loin de la moyenne nationale pour se satisfaire d’une dotation si faible, de surcroît ponctionnée à nos départements voisins.
Après que plus de 40% de nos collègues ont sacrifié une journée de salaire en suivant l’appel intersyndical du 5 février pour se mobiliser contre cet état de fait, il aurait été incohérent à nos yeux de faire autrement.

 

La séance est levée à 12h30.